Qu'est-ce qu'on se serait pris, si Scott Sturgis avait été un producteur de techno ! Allez savoir, il aurait peut-être rejoint les rangs de ces brutes ayant enrichi le versant le plus fracassant du genre, tels que Surgeon, Ancient Methods, Umek ou Chris Liebing. L'histoire en a voulu autrement, et c'est à Johannes Heil que l'on doit cette galette d'anthologie, interminable hymne à la gloire d'un seul grincement saturé engloutissant le champ sonore au rythme d'un kick à la démesure équivalente sur fond de sirènes et d'équarissage volontaire. Le genre de musique qui donnerait envie, juste pour essayer, de verrouiller toutes les issues d'une discothèque, de diriger tous les stroboscopes vers la foule et de l'envoyer dans son intégralité pour voir combien de personnes s'écroulent. C'est que le hurlement métallique prend bien trois minutes à apparaître, laissant les basses étouffer les auditeurs comme il se doit ; mais lorsqu'il se pointe, c'en est fini de toute vie : il ne lâche plus les oreilles, brûle le corps par son incessante friction, s'envole parfois dans les plus hautes fréquences des fois que certains tenteraient d'y échapper, puis redescend, sarcle par le bas, râcle sur les côtés et tabasse par le centre. Le tout suinte l'analogique, de la production aux basses suivant approximativement le kick, et le BPM relativement lent permet de piéger les sets de techno minimale pour un effet maximal. Que dire de la face B, sinon qu'elle remplit ici son rôle de face B ; très long morceau minimaliste jouant avec nos nerfs de manière convaicante mais définitivement réservé à d'autres usages – quand on a envie de garder son public vivant, par exemple.