The Alchemist › Chemical Warfare

Pas que je le vénère aveuglément, Alchemist ayant parfois trop tendance a délivrer des boucles qui font parfois un peu trop fraîchement sorties de logiciel et mal dégrossies. Mais ses choix de sons restent bittables entre mille (combien de producteurs hip-hop ricains poussent leurs activités de crate-diggers jusqu'à utiliser du 33 tours de prog hongrois ou d'ex-zicos de Magma ?) et ses choix de feats promettent souvent de l'esquimau à gros baton. Chemical Warfare, plus que 1st Infantry qui était finalement qu'un banc d'essai, représente mieux qu'aucun autre disque le style du larron. Il suffit de comparer le traitement stroboscopique opéré sur le sample du générique d'Orange Mécanique avec celui, basique et bourrin, que Necro avait livré à Cage, pour saisir la différence de niveau. Il y a aussi le casting : énorme, le résultat ne pouvait donc qu'être en deça des attentes... Que ce soit le parrain des parrains Kool G Rap, la mitraillette humaine Twista, des maquereaux west coast, des geeks dernière génération ou des légendes du boom-bap comme KRS (existe-t-il plus généreux et gouailleur comme légende du rap ?), les tueurs du mic sont clairement contents de se livrer à la figuration sur les plates-bandes d'ALC. Chemical Warfare est sensé être une démonstration du panel de Maman (le nom civil du producteur, pour rappel) tout autant qu'un terrain de jeu pour MC's vétérans, et il fonctionne à ces deux niveaux. Aux rayon tuerie, le g-funk malsain et scintillant de "Lose Your Life" avec la moitié de Clipse, agrémenté des sentences molles d'un Snoop qui se contente de cachetonner la main dans la poche et le joint au bec (mattez-moi donc le clip en lien au-dessus de la chro si ce n'est pas déjà fait), le morceau épo avec Eminem (toujours plusieurs coudées au dessus du MC moyen même sur un seul couplet) ou la saloperie de boucle lobotomisante surmontée par la clique périmée des Three 6 Mafia font partie des moments ou le geiger s'agite. Les autres morceaux se contentent juste de dérouler des gammes de beats cold et futuristes un peu bizarroïdes signature de l'Alchemist post-organique, laissant cet arrière-goût chimique sans pareil, avec quelques traits de groove garantissant digestion pour la vieille garde... côté défauts : les skits sont sans surprise assez chiants et très cons, même s'ils sont fait dans la tradition old school, ou vraisemblablement pour éviter de donner des airs trop persistants de compilation. Les tueries suscitées ressortent assez saillantes d'un ensemble qui aurait peut être gagné a être une mixtape... mais tout se tient assez admirablement, comme une pharmacie bien rangée et étiquetée avec amour. Si le meilleur de Alchemist dans ses oeuvres expé sera peut être plutôt à chercher du côté de Gangrene, dont Chemical Warfare n'est finalement que la savoureuse préquelle, la crêpe dont il est question contient suffisamment de bombinettes pour valoir réécoute et achat.