Welington Irish Black Warrior › Welington Irish Black Warrior

Par où commencer ? Il y a tant de bonnes choses à dire sur cet album...On le ressent avant même de l'entendre dès les premières secondes de 'Don't blame me', comme une vague, une onde organique qui vous glisse le long de l'échine...Une rythmique tribale secondée d'un gémissement rauque de guitare qui semble se heurter aux murs d'une pièce trop étroite et cette voix désespérée qui crie 'I do what I want' comme pour s'excuser de quelque chose qu'elle ne regrette pas...Tension, besoin d'exorciser une douleur intérieure, un jeu sur les nerfs qui durera près de quatre minutes avant une montée de batterie et un rythme salvateur qui permet d'expulser cette rage triste mais jamais complètement...Il faut en garder pour plus tard parce que la tension, c'est bon quand elle fait mal. En un seul morceau, les Suisses de Welington Irish Black Warrior annoncent la couleur sombre et claustrophobe d'un disque où l'auditeur retrouvera les meilleures pulsations de la no wave, les expérimentations à la Sonic Youth, une touche de post punk goth à la Birthday Party, sans oublier, ne soyons pas chiches, une larme de punk noisy psychédélique. Redoutables dans la maîtrise de leurs instruments et de leurs climats, les musiciens nous entraînent au coeur d'un rock brut, torturé, sans cesse sur le fil du rasoir. Cette jouissive tension est savamment orchestrée non seulement à coup de breaks, accélérations, ruptures, histoire de ne jamais permettre à une trame trop simple ou linéaire de s'installer mais également dans un jeu précis, sec, qui se lâche par moment dans un tourbillon de décibels mais jamais trop longtemps afin d'empêcher les nerfs de se relaxer. Il faut également parler du son que je trouve pour ma part franchement terrible; on a tout au long du disque une impression souterraine dont toute sonorité trop claire est systématique bannie, un faux sentiment de claustrophobie dont on se libère tant bien que mal au travers d'une guitare diabolique qui rugit, se tord, sans jamais céder à un quelconque bruitisme stérile. Le chant, noyé dans le flot musical, exprime un sentiment lancinant entre désespoir et colère, frustration et résignation, comme une tentative de compréhension vouée à l'échec ('Why don't you like me ?', 'I belong to a boring youth, because of you, because of me') et le timbre de Brynjar Thorsson colle parfaitement à cette impression. Ce n'est pas tout, le trio se fait un malin plaisir de nous balader en alternant compositions courtes et plages plus longues, le tout parfaitement équilibré, pas le moindre sentiment de longueur, d'ennui, qualités encore plus flagrantes sur le cd qui permet de s'écouter l'album d'une traite. Car oui, en plus, le groupe a bien fait les choses en sortant cet opus en vinyle avec le cd en prime. Un véritable joyau noir, un disque intense à écouter très fort.