Je reconnais que tout a commencé avec le nom, je trouvais ça plutôt marrant, surtout que musicalement, ça n'a au final rien à voir avec le genre qui est ma passion. Nos barbares sont un trio originaire de Normandie et bien que je ne sois pas un spécialiste de la scène psychédélique de l'Hexagone, je suis assez malin pour savoir que voilà encore une formation qui n'aura pas été prophète en son pays. Ça en devient redondant, comme un sport national, la France semble se faire un malin plaisir d'ignorer la plupart de ses artistes originaux (et Dieu sait qu'il y en a) pour propulser au panthéon ceux qui auront donné à la variété ses lettres de noblesse (ironie). Alors que les Yéyés battent leur plein, le groupe enregistre un brûlot bouillonnant de fuzz, de phaser, inspiré en droite ligne du Jimi Hendrix Experience. Alternant entre blues pêchu et trippé ('I remember') et délires puissamment psychédéliques, nos Français ne se contentent pas de singer mais cherchent à expérimenter, n'hésitent pas à signer quelques textes français (assez peu joyeux d'ailleurs), bref à se forger une vraie identité. Le trio cherche, varie volontiers les ambiances en glissant des tourbillons de 'Turn over ' au merveilleux 'Le jour était gris' inspiré des Beatles dans ce qu'ils ont de plus triste (c'est flagrant sur le break de trompette) sans oublier quatre pistes instrumentales où les musiciens jamment à tout vent, travaillant la guitare et les différents effets en partant de bases classiques pour la laisser partir dans des délires totalement barrés, limite bruitistes par instants, la rythmique tapissant le fond loin dans l'arrière-plan (avec une batterie au top, toute en roulements, cymbales...). On retiendra aussi 'Rêve de silence' étonnamment moderne dans ses orchestrations et qui, sans les breaks de batterie, préfigure volontiers une forme de rock indie tendue très 90's. Vous surprendrai-je en vous révélant que le succès ne fut pas au rendez-vous ? Non, bien sûr. Une fois encore, c'est la magie des rééditions qui rendra justice à certains pionniers prouvant que les bonnes expériences psychédéliques n'étaient pas seulement l'apanage des musiciens de Grande-Bretagne ou des USA. 4,5/6