Sharpe & Numan › Automatic

Mélange contre-nature ou union sacrée ? Après le succès du magnifique et glacé 'Change your mind', l'idée d'une collaboration accrue entre Gary Numan et Bill Sharpe titillait pas mal de gens ; les deux intéressés n'y étaient pas opposés non plus vu le plaisir qu'ils avaient eu à travailler ensemble mais pourtant la pensée d'un album effrayait quelque peu Gary qui venait de subir un flop dans les ventes de son disque 'Metal Rythm' (du pipi de chat en comparaison de ce qui l'attendait avec 'Outland') et craignait de décourager ses derniers fans. Il se laissera finalement convaincre et aurait mieux fait d'écouter ses prémonitions. 'Automatic', au lieu d'exploiter la veine créatrice et froide de 'Change your mind', ne propose qu'une succession de titres banals et indigestes en accord avec les canons les moins nobles de la pop de la fin des 80's. Le contraste est rude dès la seconde piste, 'Turn off the world', qui délaisse d'un coup toute originalité dans les sons, use de structures ultra conventionnelles pour l'époque avec basses slapées, synthés kitsch sur le refrain et d'horribles choeurs féminins dont le disque va être rempli, lesquels vont à plus d'une reprise ruiner le potentiel mélancolique de chansons pas toujours si mal écrites à la base mais souffrant des gimmicks de la production pop commerciale alors en vogue. Des exemples ? 'Breathe in motion' dont les sons d'orgue confèrent au morceau une touche dépouillée un peu triste que le chant de Gary confirme volontiers...Crac ! Ce putain de refrain qui gâche tout avec cette voix féminine horrible ! Vous le retirez du mixage et le morceau est bon. Idem pour 'Rip it up' qui débutait comme une pièce pop lambda mais pas désagréable, mais le refrain...Choeurs, synthés atroces, une horreur pour les oreilles...Poubelle sans remord. Soyons cléments, 'Welcome to love' sonne un brin mièvre mais là encore, on aurait pu axer la production sur un essai tristounet plaisant mais non, Tessa Niles revient à la charge et transforme le tout en conte fleur bleue du plus mauvais effet. Soyons honnêtes, il ne s'agit pas de la blâmer, l'écriture musicale elle-même est pourrie. Gary Numan n'y a pas pris part, se contentant de rédiger les textes. Beau prince, il nuance son jugement mitigé en décrivant l'album comme 'bien écrit et bien produit', ses craintes étant motivées avant tout par le déclin de sa propre carrière et le manque de promotion de la maison de disques. OK l'ami, ne sois pas si modeste, tu as vite senti que tu avais mis les pieds dans un sacré guet-apens et autant Bill Sharpe s'était montré créatif et audacieux avec ses structures de messe synthétique pour 'Change your mind', autant il renoue davantage avec le style de Shakatak sur ce disque qui est une belle daube dans la pire tradition pop 80's. A zapper donc pour se réécouter jusqu'à la lie 'New things from London town' et 'Change your mind', les uniques preuves que cette collaboration n'était pas un total gâchis...