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The Fall › The Wonderful and Frightening World Of...

cd • 16 titres • 71:27 min

  • 1Lay of the Land5:45
  • 22 X 43:38
  • 3Copped It4:16
  • 4Elves4:47
  • 5Oh ! Brother*4:01
  • 6Draygo’s Guilt*4:29
  • 7God-Box*3:18
  • 8Clear Off*4:40
  • 9C.R.E.E.P.* 3:08
  • 10Pat-Trip Dispenser*4:00
  • 11Slang King5:21
  • 12Bug Day4:58
  • 13Stephen Song3:05
  • 14Craigness3:03
  • 15Disney’s Dream Debased5:17
  • 16No Bulbs*7:51

informations

Enregistré aux Focus Studios par John Gillingham. Produit par John Leckie.

Les morceaux marqués d’un astérisque sont des bonus présents sur l’édition Beggars Banquet (1CD) de 1988. Oh Brother (5) et God-Box (7) sont tirés du single Oh Brother. Draygo’s Guilt (6), Clear Off ! (8) et No Bulbs (16) proviennent du E.P. Call For Escape Route. C.R.E.E.P. (9) et Pat-Trip Dispenser (10) constituaient à la base le single C.R.E.E.P. Sans prétendre que – pour ce cas particulier – ces ajouts nuiraient considérablement à l’écoute – toutes ces chansons sont plutôt très bonnes – on remarquera tout de même que le séquençage en est fait en dépit du bon sens – et de la cohérence première du disque – puisque ces morceaux sont disposés ça et là, sans souci de préserver la continuité de l'album original. On ne voit guère de raison – technique ou autre – qui ait pu déterminer ces étranges choix d’édition. Il eut été plus logique de disposer ces morceaux, par exemple, en fin de liste... Qui plus est, en conservant l’ordre où ils apparaissaient sur les singles et E.P. respectifs d’époque, plutôt que de les mêler et disperser ainsi.

line up

Karl Burns (batterie, percussion, basse), Paul Hanley (batterie, claviers), Steve Hanley (basse, guitare acoustique), Craig Scanlon (guitares rythmique et lead), Brix Smith (guitares lead et rythmique, voix), Mark E. Smith (voix, bandes)

Musiciens additionnels : Gavin Friday (visiteur amical - voix sur 3 et 13)

chronique

  • pyscho reaction (carburetor my arse...)

Evidemment, ça n’est pas qu’une blague. Ce titre, je veux dire : "Le Monde Merveilleux et Effrayant de The Fall". Outre qu’il décrit parfaitement les manières du groupe – et le mélange d’appréhension et de délectation, d’anxiété et de jubilation où nous plonge immanquablement sa musique brillante, acharnée, insupportable et addictive – on ne saurait trouver meilleur intitulé, quant à ce qui se joue sur ce disque particulier. Cette ambiance de train fantôme, fabrique à frisson supposé "pour rire" mais où les cris d’effroi sonnent étonnamment vrais ; l’excitation toute physique du choc et de la surprise hurlante. Est-ce l’influence de Brix – jeune Californienne à cette époque épouse de Mark E. Smith, déjà présente sur l’album précédent (Perverted By Language) et qui trouve ici pleinement sa place dans l'économie, la mécanique de l'ensemble ? The Fall et Smith semblent décidés cette fois-ci, et dès les premières notes, à investir une part bien définie de la musique… Américaine ! Adolescente, aussi. Celle jouée par tous ces groupes de blancs-becs prolétaires : rock garage, boogie graisseux remaquillé aux substances psychotropes – singulièrement, tels qu'on les pratiquait du côté de Detroit à la jointure des décennies 1960 et 1970. Musiques directes mais éclatées par la défonce ; chargées, grésillantes sur toute l’échelle des fréquences, par paquets ou toutes ensemble, selon ; avec cette insistance, cette surenchère dans la saturation des orgues et des guitares ; une lourdeur recherchée de la grosse caisse, un crissant des cymbales accentué au mixage, délibérément. Et à l’autre bout du spectre : un clavier carillonnant des timbres de cristal en mélodies naïves, motifs charmants, envols. Les Stooges ou le MC5, bien sur, pour les plus connus. Mais même plus : The Count Five voire les Flaming Groovies, tous ces jeunes gens à l’approche plus candide qui n’affichaient pas, eux, d’ambitions politiques, philosophiques, poétiques nettement déclarées. Des gens qui tous – quelques soient ces disparités dans l’approche – avaient opté pour un geste simple : se réapproprier par la brutalité, l’enthousiasme, la vigueur, cette musique rock alors confisquée par les hippies. (On sait bien combien Smith les déteste lui-même, ceux-là et leurs séquelles !). Réinjecter le goût de la panique – qui est la fête véritable – à des genres qui s’enfermaient alors dans le discours d’intention, d’une part, théorique (ce qui fera le socle au tout-venant du prog, dans l’acception la plus déprimante du terme – et je ne dis pas du tout, attention, que cela définisse le genre dans son principe ni son intégralité), humanitariste (le Jefferson Starship et ses suites, jusqu’aux Boys Scouts façon U2) ; le pur spectacle de foire de l’autre (le shock rock façon Alice Cooper, le hard rock calibré pour les stades d’Aerosmith et consorts, groupes qui avaient perdu si vite leurs fraicheurs, passés les premiers forfaits). A vrai dire l’ouverture de Lay of the Land ferait même nettement penser au We Will Fall desdits Stooges (sur leur premier album), avec ses chœurs de psalmodie et sa texture bourdonnante – en version sarcastique, bien entendu, vue le timbre d’ahuri qui décrète l’apocalypse par dessus tout ça. Et le riff de Elves ('Les Elfes' - curieusement, ça parle principalement du prix en hausse et de la qualité en baisse du Scotch ; ainsi que des 'cadavres de la mauvaise musique'...), plus loin, duplique pratiquement celui des mêmes, sur le même disque, jouant I Wanna Be Your Dog. Et la note, l’intention ironique, encore une fois n’y font pas tout. Car The Fall, en l’espèce et depuis le début, est aussi – avant tout ? – un groupe spéculatif ; dont l’art, à partir de matériaux connus, s’attache à développer des branches inédites, inconnues, imaginées de nos cultures si familières. Smith, en premier, en est devenu un maître, avec ses fictions qui nous propulsent en plein fantastique, ésotériques, fantaisies hantées ; mais qui s’ancrent et se plantent en plein réel trivial, écorchent comme en passant tous ces acteurs en représentation, tout ce qui voudrait passer pour vérité première mais n’a rien à offrir qu’un piètre jeu de pauvres masques. Voilà pour la littérature. Mais le groupe n’est pas en reste, autour, derrière, au cœur même. Feignant d’abord de reprendre les choses où les autres – Stooges, MC5 et cohortes, disais-je – les avaient non pas laissé mais attaquées, the Fall, ensuite, crée de toutes pièces des genres qui auraient vu le jour si tout n’avait si mal tourné. Dans leur version de l’histoire le rock lourd et glissant, innocent et véloce – délesté du souci de conquérir les stades – triomphe. Emerson, Lake & Palmer laissent reposer en paix les mânes de Moussorgsky ; Phil Collins est voué pour toujours à l'anonyme ; Dream Theater ou Marillion ne seront même pas, jamais, un reflet de l’ennui dans l’œil de leurs géniteurs… Dans leur vision des faits, les Doors ont enfin compris tout ce qu'ils gagneraient à foutre aux encombrants leur pesant histrion, ses outrages à Rimbaud, à Baudelaire, à toute la clique des Rimeurs. Puis de là, aussi – via une version du punk qui se ferait exemption des Ramones et de The Exploited – le groupe spécule des souches de genres qui leur sont contemporains, mais débarrassés de leurs tics de scènes consanguines, de milieu ; de leurs signes de reconnaissances vite tournés en poncifs. Avec ses basses profondes et froides, ses claviers aux timbres sombres mais luisants et translucides, The Wonderful and Frightening World trace une lignée parallèle – qui les engloberait toutes en en rejetant toute affectation – aux innombrables sous-genres d’alors que fédérait vaguement l’adjectif ‘gothique’. Les mêmes racines y sont, tournées d’un même usage : les lignes de guitare surf ou rockab’ perverties du psychobilly, au jeu délié de Brix Smith ; les ténèbres en synthés givrés de la cold-wave ou du post-punk dans sa tendance la plus portée sur le khôl et les fringues qu’on s’échange entre sexes – pas pour rien que Gavin Friday des Virgin Prunes vient poser sa diction cinglée sur deux de ces chansons ; et même, les hallucinations abrasives et veloutées des Banshees (avec Misses Smith en guise de Siouxsie ?) ne sont pas toujours loin, aux ritournelles parfaitement équilibrées des cordes et des touches. Le tout, bien sur, ramené à l’essentiel, en parties brèves et obstinées qui se répètent encore, s’emboîtent, se superposent avec un sens de l’à propos qui force l’admiration et ne nous laisse pas la moindre chance d’y échapper. En arrachant, aussi, en expulsant tous les clichés, les afféteries, les signes de ralliement des genres dépouillés. Rien qui parle de vampires ou de Lautréamont, ici ; pas de foutaises existentialistes, non-plus ! Pourquoi se planquer dans un caveau quand les salles des pubs et les cours des usines offrent une obscurité bien plus sale et fertile, au moment d’envoyer ? De ce goût du noir, The Fall n'entend extraire que la propension à l’égarement ; quelques proportions de l'espace, des qualités de conduction bien propres à explorer d’inédites résonances, de nouveaux tours acoustiques ; et puis le sens de la hantise. La grimace ambiguë, le rictus qui ressort chaque fois qu’on touche la plaie. Ça chatouille et ça pique, mais on y retourne encore… "Le Rêve de Disney Déboussolé". (Disney’s Dream Debased). C’est tout à fait ça. Ou comme disait Henry Miller : le même Oncle Walt en Gustave Doré du Cauchemar Climatisé, artiste visionnaire (malgré lui toutefois) de l'enfer américain avec ses fosses aseptisées. Ça vaut aussi pour Manchester ? Ça s’entendra toujours, quoi qu'il en soit, qu'ils sont d'un autre coin ; dans cet accent bouffé et les tournures cagneuses, en voix comme dans tout le reste ; que le plomb est d'import mais l'angle de visée local. Nous sommes tous d'un monde moderne au couchant de l’industrie. Un parc d’attraction, c’est toujours une machine. Ça joue sur le bruitage, la confusion ; la séduction de dispositifs conçus pour qu’on s’y jette, assoiffé de sensations qu’ailleurs on voudrait fuir, dérangeantes qu'elles sont… Approchez, approchez. Mark E, Smith et The Fall, les mains pleines de cambouis, lèvent le rideau du stand de tir - et ouvrent au même instant les valves des bombonnes.

note       Publiée le mardi 7 février 2012

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zugal21 Envoyez un message privé àzugal21

Y a un petit côté Stranglers, ou je divague ?

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Klarinetthor Envoyez un message privé àKlarinetthor
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cyprine Envoyez un message privé àcyprine

Y'a tout, y'a rien, surtout pas d'âme. Déçue par les mythiques The Fall... on touche presque au yaourt, là et sur Grotesque.

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Jean Rhume Envoyez un message privé àJean Rhume

Je suis un peu comme Solvant et en même temps, j'ai une certaine admiration pour les groupes qui sortent des disques à pochettes affreuses. Si je sortais un album, je passerais des heures à chercher le bon artwork, voire les bonnes matières de carton, de papier (ambiance "mon oeuvre ultime, ma création sacrée"), or The Fall fait le contraire depuis le début avec une certaine jubilation. Comme un travail de sape genre "t'aimes pas la pochette ? Eh beh t'aimeras pas le son non plus qu'est tout cra-cra, pis en bonus t'aimeras pas les paroles ni ma gueule de pochtron édenté :) L'ironie ne viendrait-elle pas ici du fait que le premier mot qu'on lit c'est "wonderful" ?. Ceci dit, je suis toujours resté hermétique à The Fall, j'ai jamais trop compris le délire mais depuis quelques années, je commence à apprécier, la laideur des pochettes faisant partie du processus.

ericbaisons Envoyez un message privé àericbaisons

les pochettes moches, c'est bon signe chez the fall