Crimson Muddle › Nocturne

Faites le test, pas celui de Rorschach (dont les taches de café n'en finissent pas d'alimenter les délires graphiques), celui de Crimson Muddle. Passez-vous le cd une fois et vérifiez si vous n'avez pas envie de le repasser aussitôt une seconde...Il met du temps à démarrer avec son intro instrumentale glauque, les arrangements dépouillés du début du 'Somnambule' mais c'est pour mieux s'imposer mine de rien, de par les glissements sensuellement vicieux de l'omniprésent violon (véritable marque de fabrique) tout d'abord puis par le chant de Hellebore, version maladroite de Amanda Palmer, qui va se révéler étrangement séduisant au fil de l'écoute. Car il faut le dire, ce premier véritable album (je n'ai pas écouté le EP disponible sur le net label Zorch Factory Records) est une franche réussite, non exempte de défauts de jeunesse certes, mais pleine d'une authenticité coincée entre adolescence et maturité adulte; déstabilisante au départ, elle se mue en véritable courtisane au travers de ses multiples facettes: cabaret berlinois ('Unsteady'), séduction gothico-gitane ('Mentiras'), dark wave nocturne ('L'innommable), sans oublier la superbe adaptation de 'La Charogne' sur lit de synthés malsains avec une récitation froide, sèche, mais avec un je ne sais quoi de quasi érotique dans cette âpreté, ou 'The Fury' pour sa touche batcave écorchée et sa mélodie. Si pour ma part, je déplore une certaine faiblesse dans la boîte à rythmes, Crimson Muddle fait déjà montre d'une identité bien affirmée, notamment de par l'usage du violon, et de ses atmosphères maîtrisées aux croisements de la cold wave, du batcave, du cabaret et de la minimal wave. Je n'irais pas jusqu'à affirmer que 'Nocturne' est un chef-d'oeuvre mais je ne crois pas me tromper en affirmant que voilà bien le type d'album que je pourrai écouter dix ans encore s'en m'en lasser.