Aranis › Songs from Mirage

Il y a, je pense, une certaine pudeur à avouer qu’on peut être touché par une musique acoustique autre qu’une folk tendance éructée par un dandy à la barbe de trois jours. L’émotion se loge partout. Encore faut-il pouvoir la reconnaître. Parfois, le snobisme n’est pas l’objet pointé du doigt mais bien la personne qui se trouve à l’autre extrémité de ce doigt accusateur. Contrairement à beaucoup d’autres, je m’obstine à saluer le courage de Homerecords qui défend une musique dont personne ne veut entendre parler. Une musique avant tout honnête avec elle-même, qui va au bout de sa logique, au bout de son raisonnement, et qui ne conçoit pas son travail comme un tremplin vers une hypothétique notoriété mais bien comme un véritable art de vivre. "Songs from Mirage" est le troisième album du groupe belge Aranis dont le spectre musical est celui d’une musique de chambre moderne. Ils perpétuent ainsi une longue tradition débutée avec Univers Zero et poursuivie en compagnie des oubliés Julverne dont ils semblent être par ailleurs beaucoup plus proches. N'oublions pas que le groupe était à l'affiche du festival de Carmaux le 19 septembre dernier, signe qui ne trompe pas sur cette hypothétique filiation. Les arrangements de cet ensemble pour deux violons, un accordéon, un piano, une flûte, une guitare et une contrebasse se voient ici rehaussés de la présence enivrante d’un trio vocal aux pieuses inflexions. Certains titres comme "Chamber Rock" ou "Lever in Plakjes" prouvent aussi qu’il n’est pas nécessaire d’être électrifié pour paraître nerveux, fruit d’un travail d’écriture parcimonieux qu’on apprend à dompter au fil des écoutes. Car, si l’album, au final, est plaisant, Aranis parle encore trop à l’esprit et pas assez au cœur.