Planets › S/t

Le marché du disque. Parlons-en. Décapitée par une large communauté d'amateurs de musique qui préfèrent s'en remettre à un mot atroce, la solidarité entre acheteurs, pour subvenir à leurs propres besoins de consommation, sans se soucier le moins du monde des conséquences de leurs actes auprès des artistes dont les intérêts passent finalement après les leurs, reproduisant le schéma qu'ils prétendent pourtant combattre à juste titre, les maisons de disques, grandes comme petites, redoublent d'effort pour tenter d'éveiller un soupçon d'intérêt dans le regard désormais méfiant du chaland. Parmi bien d'autres, le label français Distile Records a compris qu'il fallait soigner l'emballage, rendre l'objet "unique" pour au moins espérer capter dans un premier temps l'attention du coeur de cible. Soulignons donc l'originalité de la présentation du premier disque du duo mathcore californien Planets : emballé dans du tissu et orné d'une véritable feuille d'arbre. C'est simple, c'est frais, c'est symbolique. Et en plus de tirer parti de cette excentricité, c'est dans l'air du temps ! La première étape passée, vient le moment fatidique : celui où le contenu doit justifier le contenant. Autant le dire tout de suite, je ne m'attendais pas à ça. Et en vérité, c'est une agréable surprise. Là où l'esthétique choisie aurait pu d'emblée me faire songer à un essai lo-fi post rock, je me retrouve nez à nez avec un condensé (même pas une demi-heure) de rock cérébral où les structures se lient et se délient dans un maelstrom inextricable de notes et de virages à quatre-vingt dix degrés négociés de main de maître. C'est un peu comme retrouver Hella en ses jeunes années ; les titres ont beau être extrêmement courts, ils sont avant tout complexes à retenir et donc à jouer. Il y a quelque chose de sportif dans la pratique de cette musique. Quelque chose qui sent la rage, quelque chose qui devrait sentir la sueur mais qui a préféré camoufler son odeur de mâle derrière la pigmentation feutrée de la chlorophylle.