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Carl Ruggles (1876-1971) › Sun-treader

cd • 12 titres • 61:48 min

  • Charles Ives (1874-1954) : three places in new england (un programme orchestral) (1903-1914) | 18:20
  • 1I.The "st. gaudens" in boston common (col. shaw and his colored regiment)8:36
  • 2II.Putman's camp, redding, connecticut5:59
  • 3III.The housatonic at stockbridge3:45
  • Carl Ruggles (1876-1971) : sun-treader (1926-1931) | 16:23
  • 4noir à 69 poco accelerando (mesure 1)3:58
  • 5croche à 126 (mesure 51a)4:19
  • 6lento (mesure 119)1:12
  • 7A tempo (mesure 138a)1:35
  • 8noir à 69 poco accelerando (mesure 169)
  • 9Serein, mais avec une grande expression (mesure 191)3:37
  • Walter Piston (1894-1976) : symphonie n°2 (1943) | 26:48
  • 10Moderato10:37
  • 11Adagio11:11
  • 12Allegro5:00

informations

Producteurs exécutifs : Karl faust (Ives/Ruggles), Karl faust et Tom Mowrey (piston); Producteur : Rainer Brock. Ingénieur : Joachim Niss. (Ives/Ruggles) enregistrés au Symphony Hall de Boston en janvier et mars 1970. (Piston) enregistré au symphony Hall de Boston en octobre 1970.

line up

Michael Tilson-Thomas (direction), Boston Symphony Orchestra

chronique

  • enemy of the sun

"Sun-Treader" n'est pas ton ami. Carl Ruggles, de toute façon, n'était pas un ami. "Sun-treader" c'est l'anti-pitié, l'anti-sentiment... l'anti-humain. C'est une succession d'attaques de panique, un enchainement de montées d'effroi poussées jusqu'à l'épouvante cosmique, et dont les arrêts soudains, les disparitions délétères, font des silences qui suivent le plus doux des cotons, ou la pire des attentes. Un silence d'une seconde, avant que ne reviennent l'angoisse et la tension vers la terreur suivante. "Sun-treader", "qui parcourt le soleil", est ce géant dont on entend les pas lorsque s'ouvre la pièce, une marche lourde de timbales sur le décor immense d'accords de cuivres noirs, et dont le rythme s'accélère comme s'il allait sa course, pour prendre son envol dans une révélation de cordes, de cuivres et de ténèbres irradiantes, façon "Zarathoustra". Scène identifiable entre toutes, avec ses accords du destin et sa progression cinématographique, la marche du géant revient marquer l'oeuvre en quelques moments clef; entre temps Ruggles aura bâti des escaliers monumentaux, effroyables, des accumulations sonores de contrepoints étirés et dissonants, de plus en plus terrifiés et écrasants, de la terre vers l'enfer, de l'homme vers l'univers : du minuscule, vers une immensité qui le nie. Depuis le silence, immédiatement agité par des cordes qui s'étonnent et s'affolent, partant chacune dans un sens, sans cesse plus effrayées, plus hurlantes, sous l'agression des cuivres qui s'insèrent de partout en marches atonales, qui viennent s'accumuler au maelström sonore finissant par tourbillonner comme un siphon galactique qui vous avale entier. Puis retour au silence, une seconde, et ce sont le hautbois et la flûte qui tentent de petites mélodies étrangères et fuyantes, comme si elles cherchaient déjà à s'échapper de cette marée plurielle... qui arrive... ces plans austères de cordes qui se croisent, se chevauchent, balancent et accélèrent, crient, s'accumulent, hurlent, en appellent à nouveau aux cuivres dont les arrivées multiples et en notes effroyables ouvrent à nouveau le crâne à l'ampleur du néant... trop grand pour toi, sun-treader, trop brûlant pour ta peau, trop de lumière pour tes yeux. Lorsque ces extases décharnées ne s'arrêtent pas soudain, elles se délitent en contrepoints, fuyants, qui semblent se disperser dans la nuit stellaire, comme des fantômes apeurés, des spectres effarés par l'ampleur du soleil. Mais n'oublie pas qu'il t'a rendu aveugle, et que pour toi c'est le noir. Des escaliers monumentaux, effroyables, de l'infiniment toi à l'infiniment grand. Des révélations insupportables au déroulement plus ou moins accidenté, plus ou moins large, plus ou moins abrupt; des silences qui s'imposent tout à coup, ou se révèlent lentement, sous les voiles de lumière qui se dispersent peu à peu... le retour du géant, dont on reconnait le pas titanesque mais qu'on ne pourra pas suivre, car nous c'est le trop grand, le trop vaste, l'écartèlement sensoriel et l'explosion par le vide qui nous attendent. L'idée est systématique, le procédé toujours semblable, mais le détail chaque fois différent. Il faut parfois dix secondes pour passer du silence à l'irradiation, parfois plus d'une minute... parfois deux. La partition nous pyrolyse et nous laisse là, la chair à vif, retomber d'un seul coup sur le sol aride d'un caillou satellite, tout seul dans l'univers... au spectacle terrifiant de l'infini cosmos, au spectacle insoutenable de notre propre, et fondamentale inexistence. Mais les planètes bougent à nouveau, et à nouveau, le rayon d'un astre étranger à ton sort vient percer l'interstice et s'ouvre peu à peu, dans la plus terrible, la plus violente, et la plus irascible des attaques de lumière... et tout part en lambeaux, tout se déchire sous le coup des cymbales et la force anti-matière de la densité des tons accumulés. Tu as parfois quelques minutes pour regarder le paysage vide et clair-obscur de la nouvelle planète où tu viens de tomber... elle est vide... il n'y a rien que des roches... et soudain tu entends les pas du géant qui revient, surgissant de derrière Jupiter, immense comme trois soleils, et qui finit lui-même dans une ultime baston de colosse par se faire disloquer dans l'éclat surpuissant de l'astre, la blancheur aveuglante de son énergie brute. Non, toi : tu ne vas pas mourir... puisque tu n'existes même pas. Trop loin de toi pour connaitre la pitié, et même juste pour te voir; "Sun-treader" est une succession d'extases interdites, de retour à la poussière, de négations cosmiques... de vols d'Icare.

note       Publiée le jeudi 28 janvier 2010

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