Litfiba › Tre

Ce troisième opus sobrement baptisé achève pour Litfiba la 'triolgia del potere' permettant au groupe de tourner le dos à sa période la plus new wave. Il était temps, nos Italiens se sentent de plus en plus à l'étroit dans leurs racines post punk et cela s'entend. Album engagé, 'Tre' devait s'appeler à l'origine 'Prigionieri en accord avec la pochette montrant Willie Jasper Daren exécuté en Floride en 1988 malgré de forts doutes quant à sa culpabilité. La troisième pièce, 'Louisiana' est d'ailleurs consacrée au thème de la peine de mort. Ce n'est pas tout, 'Santiago' fustige la visite du Pape au dictateur Pinochet, 'Tex' dénonce le génocide des Amérindiens, 'Ci sei solo tu' aborde la question des abus dans le traitement des maladies psychiques...Ambiance combative pour une variété d'influences musicales puisque 'Santiago' se présente comme un morceau de rock violent et écorché, le superbe 'Paname' se colore d'influences latines, tandis que 'Tex' dévoile des ambiances 'western'. Au niveau de l'écriture, 'Tre' est un bon album, pourtant le résultat déçoit. La raison ? Comme expliqué auparavant, Litfiba est de plus en plus tenaillé par le démon du rock, le vrai, celui qui laisse rugir ses guitares, écrase les claviers, veut d'une batterie pleine, moins sèche, où son charismatique chanteur peut se lâcher totalement...Bref, un groupe de scène. Mon drame est d'avoir découvert la plupart des chansons ici présentes lors d'un concert à Lausanne retransmis à la radio suisse; c'était tellement bon, sauvage et puissant que ces enregistrements studio sonnent parfois un peu plats. C'est le cas pour 'Tex' dont le potentiel est clairement étouffé (les claviers sonnent même hors de propos); malgré ses riffs puissants, le bon 'Santiago' ne dégage pas l'énergie que lui offre la scène. Le plus 'enfermé' reste Piero Pelù; rien à dire sur ses prestations vocales, convaincantes et puissantes mais en deçà de ses capacités face au public. 'Tre' reste un bon disque de rock mais également un travail de transition. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si un changement de personnel important suivra, le clavier s'en allant peu après (même s'il collaborera encore en invité), ainsi que le bassiste, sans compter le batteur qui rejoindra CSI (ex-CCCP). Reste que 'Santiago', 'Paname', Cuero di vetro', 'Corri' ou 'Tex' valent largement l'écoute, ne fut-ce que pour les arrangements riches qui les caractérisent.