Voice Of Eye And Life Garden › The Hungry Void - Volume Two : Air

Tandis que le rituel du Feu s'ouvre dans un silence monacal avant de laisser les premières langues brûlantes caresser le ciel et embras(s)er l'atmosphère pour creuser le tunnel de la pure énergie, celui de l'Air se lance aussitôt dans une lourde orchestration percussive : les peaux résonnent de part et d'autre de l'espace sonore, les bâtonnets et autres grelots remuent et provoquent le Temps, les cordes et les cors aux attaques lentes et progressives soulèvent le sol meuble par monts et vallées jusqu'à ce qu'apparaisse l'élément sollicité : l'Air, cette entité insaissisable et fuyante, ce Prince des Épées refusant de tenir en place ni en lui-même ni dans le monde, volatil et superficiel tout en étant libre et riche d'une intuition et d'une vivacité sans égale. Il va falloir le maitriser et plus d'une fois il sera représenté par ces sirènes aux harmoniques déformées et glissantes quand il n'est pas simplement silence, glissant entre les souffles et les chuchotements, se faufilant entre une réverbération de peau et une autre plus acousmatique, vaguement assimilable à un reste de voix ou un murmure inintelligible, jusqu'à ce qu'il s'affranchisse de ses dompteurs et devienne entité matérielle pour laquelle des louanges sont lancées, des rythmes sont joués et des cordes sont étirées. Tout en célébrant sa nature profonde, les musisicens approfondissent et développent leur rituel jusqu'à ce que tout se mêle en un seul tableau cosmique et organique, rejoignant les sphères comme pour manifester l'évidence : la magie n'est, après tout, qu'affaire de connexion. Cette dernière phrase, entendue lors d'une nuit d'été finlandaise sans ombre ni lune, m'apparut alors comme d'une désarmante évidence ; elle venait d'un membre d'une trop rare formation à avoir poussé encore plus loin la syntaxe et les visées animistes de Voice of Eye : Halo Manash, une des seules entités encore en activité à s'affirmer en tant que musique élémentale, se réappropriant les racines shamaniques et le profond respect pour le monde d'à côté afin de renouer avec un état primordial depuis bien longtemps oublié.