David Karsten Daniels › Fear of Flying

David Karsten Daniels le confesse ; il a peur de s’envoler. Alors que moi, ça fait plus de quarante-huit heures que je plane avec mes 38°6 de fièvre et que, pétri de douleurs et de courbatures, j’aimerais délicatement me poser sur un océan de coton. Cette petite musique douce qui n’a, semble-t-il, aucun scrupules à afficher ses doutes et exposer ses blessures m’accompagne ainsi dans mes tourments, dans les plis et les replis de ma couette, vibrant avec elle au gré de ses pérégrinations parfois bien délirantes. Seules, dominent sur ce monde austère et renfrogné une voix brisée, quelque peu plaintive, et une guitare sèche, de temps à autre rehaussées par des orchestrations plus fouillées ("Wheelchairs", "Evensong") et quelques arrangements montrant un peu plus de caractère ("That Knot Unties ?"). Plutôt que de tenter de dresser un parallèle facile avec les nouvelles coqueluches de l’americana lo-fi contemporaine, c’est dans les valeurs sûres que Karsten Daniels a été trouvé refuge, et on ne va pas lui donner tort ! Un peu comme si le Neil Young de "Weld" avait décidé de réenregistrer ses titres les plus introspectifs en compagnie du Crazy Horse (le solo de guitare bien noise de "Falling Down"), le tout sous la lumière blafarde du Springsteen de l'intemporel "Nebraska", à la production spartiate si mémorable. Le genre de truc tellement personnel qu’il vous prend à la gorge. Cela n’empêche pas "Fear of Flying" de faire des détours surprenants (les expérimentaux "A Myoclonic Jerk" ou "A New Garment", lorgnant du côté du néo-zélandais Roy Montgomery) ainsi que des incartades moins heureuses ("Martha Ann" et "Oh, Heaven Isn’t Real") trop connotées country. Au bout de cette petite demi heure bien tassée, David Karsten Daniel aura su nous toucher et nous émouvoir. Il nous aura aussi prouvé, si l'on en doutait encore, que ce sont les histoires les plus simples qui se révèlent être souvent les plus touchantes.