Vous êtes ici › Les groupes / artistesRRed › Felk

Red › Felk

8 titres - 43:57 min

  • 1/ Baby please don’t go
  • 2/ Reindern town
  • 3/ The drunkards
  • 4/ She is in war
  • 5/ I saw the light
  • 6/ Dyin’ in the wine
  • 7/ Road to nowhere
  • 8/ I get on my own special way

informations

Enregistré et mixé par Red, à la maison, 1999-2000

Dessins: Hendrik Hegray

line up

Martine Lanciot (mother talk), Red (électronique, guitares et chant), Coiffier (hurlement), Vincent et Luc (réflexion sur les pans coupés), Chloé (improvisation vocale et percussion au biberon), Margot (poésie enfantine spontanée)

chronique

  • extreme low-fi home-studio

TA GUEULE !!!! Voilà comment on vous accueille. D’emblée, en guise de Bienvenue, juste pour vous mettre dans l’ambiance. Et puis juste après : Baby Please don’t Go ! Sur fond de bourdonnements basse-fidélité, au milieu de glissandi de guitare (acoustique) semi aléatoires. Diantre, d’où peuvent-elles bien venir ces Eaux Boueuses là ? Cette voix impassible et crevée ? Ce jeu erratique, tout en cassures puis en hésitations, en prudente lenteur. L’embouchure du Mississipi ? Le détroit du Mékong ? Un caniveau de Villeurbanne ? De l’Intérieur, c’est sûr : du Dedans. Ce disque est un objet autistique, autarcique, en repli. L’acception extrême du Home-Studio. Matériel à bas prix et manque d’espace : la machine souffle et craque. Interférences magnétiques. La chaise grince au moindre mouvement. Le ventilo qui se déclenche quand le disque dur s’échauffe. Dans la chambre à côté -ou bien n’y a-t-il qu’une seule et même pièce - les enfants geignent ou babillent. La Maison… Le dehors n’est présent que comme intrusion. Une infiltration, un dégât des eaux. Un bruit atténué. De l’autre côté de la mince paroi, on remplit un verre au robinet. Tout ce qui pénètre est déformé, filtré, étiré ou compressé. Détrempé jusqu’à ne plus trancher sur la teinte passée des murs intimes. Les chansons même se fondent à la couleur locale. Muddy Waters donc, mais encore Hank Williams en version terminale, épuisé jusqu’à l’os (I Saw the Light nous jure-t-il du fond de sa catatonie). Même David Byrne prend ici une allure imbibée, poreuse, piquée de crachotements dignes d’un antique magnéto à bandes, percluse des raclements d’une guitare en fin de service. Un long coup de klaxon vient se superposer un instant aux crépitements de la mécanique. Et soudain il y a doute. Quelque chose détone dans ce dérèglement. Le malaise est trop parfait. Cet incident d’enregistrement, cet aléa… On le dirait monté en boucle, trop long, trop régulier en ses variations pour un simple impromptu. Et si toute cette promiscuité, cette gêne, cet inconfort d’écoute, ces apparents parasitages, étaient finalement délibérés ? À réécouter Reindern Town, son chaos à basse tension, Dying in the Wine et son beat sale (kick lointain et fréquence abrasive en guise de drive) on se dit que décidément non, sans montage, sans intention, jamais les cris de bébé n’auraient pu coller si exactement à ces embryons d’improvisation nerveux, crispés ; s‘emboîter si étroitement au moment où le chant marque une pause pour reprendre son souffle. Il faut se rendre à l’évidence : tout ça est bel est bien voulu. On aurait dû se méfier dès la pochette, expédiée au marqueur façon Half Japanese monochrome, faussement maladroite. Ce type étrange au front qui se dégarni, avec son air un peu triste et buté, sait très bien ce qu’il fait. Trop tard ! Il nous a happé dans son isolement, entraîné dans ses murs. Il faut maintenant saisir son rythme. Sentir tout ce qui bruit sous ses histoires sans gaieté, sa narration monocorde. On s’habitue, on finit par aimer ça, par guetter la suite. Qu’il espère bientôt mourir dans le vin n’a plus l’air si incongru. La Route vers Nulle Part en vaut bien une autre. On l’emprunterait avec lui, volontiers. Au moment d’en finir, le type nous glisse une dernière confidence. Pas une excuse. Un blues lent sur de rares accords. Il va son propre chemin. Il a sa manière, particulière, inimitable. Inutile de vouloir le suivre ou de lui barrer le passage. Impossible de le juger. La voix s’est adoucie, les cordes sont effleurées. Au battement sourd répond un doux clapotis en écho. Même les bruissements de l’électronique se font cotonneux, envappants. On se sent gourd et sans vouloir. Puis soudain jaillit une voix d’enfant, claire, cristalline, qui fend la torpeur. Un monologue enthousiaste, spontané, qui nous tire de la léthargie. Et quand le type revient pour son dernier refrain, on voudrait déceler une bienveillante ironie dans ses mots fatigués. Le silence se déploie et l’air s’est rafraîchi. On sait gré à cette fillette de nous avoir raccompagné à la surface. On sait aussi qu’on reviendra, en connaissance de cause cette fois, rôder dans les parages de ce drôle de songe domestique et renfermé. On en goûte désormais la curieuse hospitalité. Un détail, toutefois, revient nous piquer juste avant de faire le noir : cette gamine, toute contente d’annoncer une nouvelle à son père… Est-ce bien d’une cave qu’elle parlait ?

note       Publiée le samedi 12 juillet 2008

Dans le même esprit, Dioneo vous recommande...

Red - Songs From A Room

Red
Songs From A Room

L'achèvement d'une étape.

dernières écoutes

    Connectez-vous pour signaler que vous écoutez "Felk" en ce moment.

    tags

    Connectez-vous pour ajouter un tag sur "Felk".

    notes

    Note moyenne        2 votes

    Connectez-vous ajouter une note sur "Felk".

    commentaires

    Connectez-vous pour ajouter un commentaire sur "Felk".

    Dioneo Envoyez un message privé àDioneo
    avatar

    Ici, aussi... Reinder Town, Ô Vérole.

    Et donc... Il y avait là son hommage à celui-de-la-Cuve, (lis-je... Resté au fond de Lille, j'entends).

    Salut, alors, aux vivants.

    Solvant Envoyez un message privé àSolvant

    Définitivement mon Red préféré. 'Felk' est un fantôme, un spectre. Cru, laiteux, et très malade. Il s'enfonce dans une agonie sèche & isolée assez rapidement. Après tout ça, difficile de se décontaminer.

    Note donnée au disque :       
    Dioneo Envoyez un message privé àDioneo
    avatar
    Non mais à la base j'ai dit "Villeurbanne" parce que le mec vit (vivait ?) là-bas, hein...
    Wotzenknecht Envoyez un message privé àWotzenknecht
    avatar
    Vénissieux ça va encore parce que c'est assez 'plat et étendu' (à l'américaine) mais en effet, un caniveau de Vaulx-en-Velin ferait bien l'affaire.
    Dioneo Envoyez un message privé àDioneo
    avatar
    Vénissieux, Vaulx-en-Velin, Décines...